mercredi 25 mai 2011

Billet n°1 - Liberté ou esclavage : Les téléphones cellulaires

Q: Lardellier cite un des jeunes qu'il a interviewé : « Être joignable 24 heures sur 24, cela provoque un manque de liberté. Et si on ne répond pas, si on ne rappelle pas, en plus, ça engendre des conflits. » Après vos lectures et suite à votre réflexion sur les sujets abordés, je vous pose la même question que celle présentée plus haut dans la section Quelques questions préalables: Dans quelle mesure le téléphone mobile ne devient-il pas un esclavage plutôt qu'une liberté? Cela vous rappelle une expérience personnelle?


Le téléphone portable, appelé cellulaire au Québec ou mobile en France, est devenu un objet très répandu. Selon le texte de Corinne Martin, en 2002, le nombre d'abonnés au service de télécommunication était de 37,8 millions en France.1 Selon l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) de la République française, en 2009 le nombre d'abonnés a atteint les 58,9 millions. 2.(Pinson; 2009)

C'est à la mode, c'est tout nouveau, c'est beau, c'est chic, technologiquement avancé; si tu n'as pas le dernier modèle, tu es démodé et ton téléphone obsolète. Voilà ce que nous vendent les nombreuses compagnies de téléphonie mobile. Le marché du mobile a explosé. Les publicités se font plus nombreuses, les compagnies souhaitent offrir les prix les plus bas, et un service de moins en moins défaillant. Ces compagnies ont transformé notre relation avec le téléphone. Ils ont créé un besoin qui n'en est pas un. Personnellement, je n'ai pas besoin d'être constamment en contact avec des gens.
Ce phénomène découle parallèlement d'un changement dans la structure économique, où les entreprises ont besoin d'être en contact avec leurs employés, et vice versa. Jusqu'à atteindre le stade où un seul cellulaire ne suffit plus. L'outil qui devait générer de l'autonomie et de la liberté nous garde attaché à notre famille et à notre emploi. Le mobile permet aussi aux employeurs de faire de l'ingérence dans nos vie.

"L'autonomie ne peut exister sans son contraire, l'hétéronomie. D'où le paradoxe, qui transformerait le portable en instrument de contrôle social. Contrôle de l'autre par son maintien dans une relation de dépendance, voire de soumission permanente, dans les sphères privée et professionnelle. Contrôle du citoyen et de sa liberté de circuler par le pouvoir politique: les portables rendent en effet techniquement possible le repérage spatio-temporel de tout usager."1. (Martin; 2003, p92)

Sommes-nous des esclaves? Il n'existe pas de réponse précise, car chacun a une relation qui lui est propre avec l'outil. Certains en sont dépendants et acceptent rationnellement ce fait. Comme le syndrome de Stockholm, notre vie sociale est prise en otage par le mobile, et les utilisateurs finissent par éprouver de l'empathie et même de la sympathie envers leur ravisseur... Cet objet rassurant et coûteux semble nous rapprocher virtuellement, mais nous éloigner physiquement les uns des autres. Sommes-nous tous seuls les uns à côté des autres?

Bien sûr, l’utilisation des technologies sans fil facilite certains aspects de la vie quotidienne des individus et de leur famille. Cette souplesse ne fait toutefois qu’accentuer les inégalités. Dans une société où les loisirs et le labeur sont répartis de manière inégale entre les classes, où l’allongement de la durée du travail, notamment aux États-Unis, le chômage, la destruction des services publics rendent plus pénibles la vie des habitants, ils se tournent vers la communication mobile pour tenter de surmonter, individuellement, des difficultés quotidiennes insaisissables autant qu’écrasantes. 3. (Schiller; 2005)


Esclave ou homme libre, la question persiste. Cet outil apporte-il suffisamment de bénéfices, en contrepartie des effets néfastes qu'il peut avoir sur notre quotidien?
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1. MARTIN, Corinne. Revue Sociologie & communication, Communication et langages - Année 2003 - Volume 136 - Numéro 136 - pp. 92-105. Article: "Le téléphone portable : machine à communiquer du secret ou instrument de contrôle social ?". Url en ligne: http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/colan_0336-1500_2003_num_136_1_3209. Consulté le 24 mai 2011.

2. PINSSON, Élise. Silicon.fr. "59 millions d’utilisateurs de téléphones mobiles en France". 6 Aout 2009. Url en ligne: http://www.silicon.fr/59-millions-dutilisateurs-de-telephones-mobiles-en-france-36528.html. Consulté le 28 mai 2011.

3. SCHILLER, Dan. Monde-diplomatique.fr, "Illusoire liberté, immense marché - Esclavage volontaire du téléphone portable". Février 2005. Url en ligne: http://www.monde-diplomatique.fr/2005/02/SCHILLER/11911. Consulté le 28 mai 2011.

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